Pratiquer le théâtre en « amateur » signifie qu'on se livre à cette activité en dehors de tout engagement professionnel, qu'on peut s'en éloigner un temps pour y revenir, en fonction de ses disponibilités de loisir.

Mais cela n'implique en rien l'absence d'effort et de rigueur.

Si Françoise Kerver tient à vérifier la motivation des candidats à l'inscription, puis à assurer la sélection des scènes présentées lors du spectacle public de fin de saison, c'est qu'elle attend de ses élèves, pour chacune de leurs interprétations, le même engagement que celui qu'elle exigerait de la part de comédiens professionnels.



Françoise Kerver au milieu de ses élèves sur la scène du théâtre Mouffetard

Au théâtre, les applaudissements du public récompensent le sentiment d'avoir été transporté dans une situation chargée d'émotions qu'on a suivie et vécue en tant que spectateur comme si elle était réelle, sans percevoir le moindre artifice. Il doit en être ainsi pour une pièce entière comme pour une scène d'une dizaine de minutes. C'est au nom de cet objectif difficile, parvenir à donner l'impression du naturel en jouant juste, qu'il n'y a pas de complaisance pour un « travail d'amateur » au cours Kerver.

L'exigence requise suppose d'abord une maîtrise absolue du texte. C'est là le premier devoir du comédien, car on ne peut envisager la moindre mise en jeu si les répliques et les situations sur lesquelles elles s'appuient ne sont pas parfaitement connues.

Elle suppose ensuite un investissement culturel dans les circonstances qui encadrent la scène, en se renseignant sur l'auteur, son oeuvre, son temps et celui de l'action, car une bonne connaissance des éléments de contexte est indispensable à la construction du personnage tel que le comédien doit, au sens propre, l'incarner.

Elle suppose enfin des préparatifs concernant les costumes et les décors, afin de fournir au spectateur les repères visuels indispensables à une entrée rapide dans l'univers où l'action se projette.

Les échanges avec le professeur, avec les partenaires de jeu durant les répétitions, avec les anciens élèves qui ont déjà interprété les personnages, contribuent à favoriser cette mobilisation nécessaire à l'éclosion d'une scène. Mais le succès de celle-ci, c'est à dire sa métamorphose en un moment intimement suivi et vécu par le spectateur, repose in fine sur l'implication personnelle du comédien, que celui-ci s'investisse dans son rôle comme professionnel ou comme « amateur ».